Yohann Berhouc, Directeur Général de Cyrès a donné son point de vue en juin dernier sur la manière dont les grands groupes utilisent leur budget innovation au travers les différents départements qui les composent. Comment se constitue un budget innovation, comment les DSI s’organisent-elles en fonction de celui-ci, quels sont les objectifs de développement qui y sont associés. Des thèmes traités dans cet avis d’expert, publié initialement chez ZDnet.fr et Docaufutur.fr.
Organisation transversale des DSI des grands groupes avec leurs filiales
Pour arriver à déployer des services informatiques de manière transversale, au regard d’un budget innovation connu à l’avance, les grands groupes peuvent s’appuyer sur les nouveaux services amenés par la révolution technologique du cloud. Bien que la transformation de l’informatique vers le cloud nécessite de nombreux efforts humains pour être menée à bien, elle permet aussi à un groupe de délivrer plus facilement et plus rapidement ses services à l’ensemble de ses filiales.
Les nouvelles opportunités du cloud permettent de construire plus facilement des modèles de livraisons de services informatiques d’un groupe vers ses filiales. La DSI groupe peut dès lors répondre à des besoins métiers différents d’une filiale à une autre, malgré des contraintes de localisation géographiques, de sécurité informatique ou propres à un cahier des charges.
C’est notamment la flexibilité d’utilisation des infrastructures et des architectures proposées par les fournisseurs de cloud public qui permettent finalement aux DSI groupe d’élaborer des modèles de distribution de services sur-mesure. La distance géographique et la sécurité des réseaux par exemple, ne sont plus un frein à l’installation, à la sauvegarde ou à la maintenance d’un service informatique. Par ailleurs, les fournisseurs cloud spécialisent leurs offres pour répondre à la diversité des besoins métiers et il devient donc rare de ne pas trouver chez l’un d’eux le service adapté.
En résumé, la mise en œuvre de services cloud s’est accélérée grâce à la diversité des offres du marché, permettant ainsi plus de transversalité entre une DSI groupe et ses filiales.
Une DSI groupe a pour objectif l’optimisation des processus de développement et le ROI
La diminution des coûts de recherche et développement, par la centralisation en amont de l’innovation, au regard des besoins exprimés par les différentes filiales, est à la base des objectifs de transversalité recherchés par une DSI groupe.
C’est en effet la mutualisation des projets d’innovation qui doit permettre de développer des services et des outils qui seront adaptés aux problématiques de plusieurs filiales. L’objectif ici est de pouvoir recueillir les besoins en innovation des filiales et d’y répondre afin de leur libérer du temps pour poursuivre le déroulement de leurs activités. Elles ne se concentrent plus que sur la mise en œuvre opérationnelle de leurs services, leurs stratégies de développement commercial, à un niveau local et adapté à leur contexte.
L’accélération de la performance, fait également partie des objectifs d’organisation transversale des services informatiques d’une DSI avec ses filiales. Pour pouvoir gagner en performance il est donc nécessaire d’accompagner les processus de développement des services ou des produits de chaque filiale.
Cela passe ainsi par une organisation structurelle où la DSI groupe, grâce à la richesse et la souplesse des offres cloud disponibles sur le marché, met à disposition de ses filiales les outils et les services nécessaires, quasiment sur demande. Cependant, le transfert de la responsabilité technique d’une infrastructure sur un cloud provider, n’est pas seulement un enjeu business et financier pour les grands groupes. Il coïncide aussi avec des technologies arrivées à maturité qui permettent de mieux envisager l’externalisation de services dans le cloud et favorisent ainsi la croissance des entités filiales.
Dès lors, l’optimisation des cycles de développement logiciels, le déploiement continu d’une application N fois par jour, le débordement de charges de travail sur une infrastructure parallèle ou la mise en œuvre de PRA/PCA vont être des opérations plus stables et plus simples à réaliser, pour un groupe comme pour ses filiales.
Le budget innovation doit-il être uniquement traduit en technologies ?
Pour justifier un choix technologique ou prioriser les actions les plus rentables à mener en faveur de la croissance, il est nécessaire d’analyser les processus internes et le contexte du groupe avec ses filiales avant de se poser la question dont va être utiliser le budget innovation.
Un choix technologique, bien qu’il soit a priori vecteur de bénéfices de par son usage, doit s’accompagner d’une analyse des processus internes de la société pour pouvoir formuler une réponse complète au contexte client.
Il s’agira ainsi d’introduire de l’agilité, pour procéder à l’évaluation des outils de travail et à l’optimisation des réunions (sélection uniquement de chefs de projet, de managers, de product owner). Le reste de la communication et le suivi de projet vont être assurés par de très courtes réunions journalières voire hebdomadaires (si nécessaire) ainsi qu’un scrumboard (tableau de bord) bien géré.
- Introduction de l’agilité : l’objectif est de percevoir son utilité rapidement. S’il y a une ritualisation, sans perception de gain sur la visibilité et le déroulement d’un projet, alors l’objectif d’agilité est perdu.
- La démarche d’agilité doit être transparente pour les équipes et nécessite donc d’utiliser les bons outils, au bon moment.
L’ajout d’automatisation dans les cycles de développement du groupe et de ses filiales, va être aussi essentiel. Il existe une émergence de nouveaux outillages informatiques, notamment ceux appartenant aux méthodologies DevOps, qui dorénavant permettent l’automatisation de nombreux processus et l’accroissement des performances de développement. L’objectif est donc d’automatiser toutes les tâches récurrentes sans valeur ajouté.
- Avantages : cela permet de standardiser les process, de réduire le nombre de tâches manuelles quotidiennes et augmenter la valeur ajoutée de chaque salarié, de réduire le nombre d’erreur possible et d’incidents déclarés quotidiennement.
- Inconvénient : nécessite une phase de formation et d’accompagnement pour assurer la mise en place des nouveaux process au contexte de l’entreprise. La multiplication des individus prenant part à un projet et les liens entre eux, nécessite d’établir une nouvelle organisation entre les équipes et d’appréhender une nouvelle manière de collaborer. Le facteur humain étant le plus gros frein au changement.
Le facteur humain reste le premier poste de dépense d’un budget innovation
Pour profiter de tous les apports du cloud, il est nécessaire de remettre en question les process et les outils habituels de l’entreprise, nous l’avons vu.
Il existe une inertie au sein des grands groupes, due au grand nombre de personnes à mobiliser autour d’un projet. La conséquence est le ralentissement des process internes et des cycles de développement des produits/services. Pour répondre à ce manque d’agilité, les groupes vont donc avoir tendance à investir en capital humain, mais aussi pour permettre à l’innovation de perdurer.
Les grands groupes ont tendance à investir d’avantage, dans le cadre de leur budget innovation, dans les effectifs en ciblant des profils spécialisés de chefs de projet, de product owner ou de scrum master. Cependant cela ne règle pas tout dans la mesure où la multiplication des effectifs accroit le nombre de communications par ailleurs. On observe en réalité une coordination des équipes plus complexe, une augmentation du nombre de réunions et des temps de planification. Le gain par rapport au temps/argent investit pour répondre à la problématique projet n’est pas probant en définitive.
On remarque cependant qu’une part des grands groupes ayant identifié cette problématique, se concentrent, parallèlement à leurs recrutements, sur les méthodologies de travail et les processus d’agilité. Ils investissent plus fréquemment et innovent en inscrivant leur organisation et leur cycle de développement dans une approche orientée DevOps. La recherche de cohérence et d’efficacité devant conduire à accélérer leur développement opérationnel.
L’approche DevOps emporte avec elle des méthodes et des outils permettant des cycles courts dans les différentes phases de réalisation d’un projet. Il est possible de développer, de tester et de livrer un service tout en bénéficiant continuellement de retours utilisateurs, d’une communication unifiée entre les équipes, de temps de réunions et de briefing courts. Et c’est en cela que le recours au DevOps représente la meilleure alternative à ce jour, pour fluidifier la production et l’innovation au sein de grands groupes, qui pour certains ont déjà compris l’intérêt de travailler différemment tout en adoptant de nouveaux services cloud.
Avis d’Expert initialement publié sur ZDnet.fr et Docaufutur.fr